Gustave Roger dans Le Prophète. © COLLECTION JOSÉ PONS

Portrait du ténor Gustave Roger, créateur du rôle principal du Prophète.

Gustave-Hippolyte Roger voit le jour le 17 décembre 1815, à La Chapelle-Saint-Denis, commune rattachée plus tard à Paris. Son père exerce la profession de notaire. Sa mère est la petite-fille de Jean-Baptiste Corsse, librettiste, comédien et directeur de théâtre (1759-1815), créateur, entre autres, du rôle travesti de Madame Angot, dans la pièce du dramaturge Joseph Aude, Madame Angot au sérail de Constantinople, représentée 237 fois consécutives.

Le jeune Gustave se retrouve malheureusement orphelin de bonne heure et passe sous la tutelle de son oncle, lui aussi notaire : son orientation professionnelle semble, dès lors, toute tracée. Pourtant, tout en poursuivant des études de droit, il joue en cachette le vaudeville sur la scène du populaire Théâtre Chantereine, suivant en cela l’exemple de son arrière-grand-père. Alarmé, son tuteur l’envoie chez l’un de ses confrères, à Argentan, histoire de l’éloigner des tentations parisiennes. Mais la vocation est plus forte que tout.

Argentan ne possédant pas de théâtre, le jeune homme en crée un de toutes pièces, se faisant directeur-organisateur-metteur en scène, et recrutant ses comédiens parmi les habitants de la riante cité normande. À l’auberge du Lion d’or, il présente ainsi trois courtes pièces d’Eugène Scribe. Sa passion pour la scène est telle que, de nouveau exilé par son oncle, cette fois à Montargis, il y réitère l’expérience !

Devenu majeur, Gustave Roger prend son destin en main et décide de devenir chanteur, ses proches louant déjà sa jolie voix de ténor. Il intègre le Conservatoire National de Musique et de Déclamation de Paris, où il est l’un des derniers élèves de l’illustre baryton Jean-Blaise Martin. Pour la déclamation lyrique, son professeur est Laurent-Joseph Morin, dont le Traité de la prononciation indiquant les moyens d’obtenir une bonne émission de voix, de corriger les accents vicieux et tous les défauts de prononciation a été maintes fois réédité. Les progrès du jeune aspirant sont rapides et, seulement un an plus tard, en 1837, il remporte ses Premiers prix de chant et de déclamation lyrique.

Ses études à peine achevées, Gustave Roger fait ses débuts à l’Opéra-Comique, le 16 février 1838, en Georges dans L’Éclair de Fromental Halévy. Les journaux du temps soulignent sa voix pure et de belle étendue, son excellente méthode, un grand sentiment musical, un jeu très convenable et un physique heureux (il est alors fort mince). Gravissant rapidement les échelons, il devient « premier ténor » en titre après le départ pour Bruxelles, en 1842, de son rival Joseph-Antoine-Charles Couderc (1810-1875), créateur d’Horace dans Le Domino noir d’Auber et de Daniel dans Le Chalet d’Adam. Il participe à de nombreuses reprises (La Neige ou le Nouvel Éginhard et Lestocq d’Auber, Le Domino noir, Le Chalet, La Dame blanche) et incarne le rôle-titre dans Richard Cœur de Lion de Grétry, pour l’entrée de l’ouvrage au répertoire de la maison, en septembre 1841. Mais ce sont surtout les créations qui occupent le plus clair de son temps.

Parmi elles, Halévy occupe une place prépondérante, avec Le Shérif (1839), Le Guitarrero (1841) et Les Mousquetaires de la reine (1846), au même titre qu’Auber, avec Le Duc d’Olonne (1842), La Part du diable (1843), La Sirène (1844), La Barcarolle (1845) et Haydée ou le Secret, qui marquera les adieux de Roger à l’Opéra-Comique, le 28 décembre 1847. Citons encore L’Aïeule d’Adrien-Louis Boieldieu (1841), court ouvrage écrit à son intention par le fils de l’auteur de La Dame blanche et dans lequel, son aisance scénique s’étant affermie, il incarne avec succès un rôle de ténor/soprano, en recourant au falsetto et à la voix mixte, comme la plupart des ténors de son temps. Parmi ses autres créations : Thérèse de Carafa, Mina ou le Ménage à trois du jeune Ambroise Thomas, ou encore Gibby la Cornemuse de Clapisson.

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 129

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