Michel Sénéchal. © COLLECTION JOSÉ PONS

À partir du 20 février, sous la direction musicale de Julien Leroy et dans une nouvelle mise en scène de Pauline Bureau, l’Opéra-Comique redonne sa chance au chef-d’œuvre incontesté de Boieldieu, vingt-trois ans après sa dernière apparition entre ses murs. Un véritable événement, tant on comprend mal pourquoi cet « opéra-comique » en trois actes, fleuron du genre et l’un des plus souvent représentés à Paris entre sa création, le 10 décembre 1825, et la Première Guerre mondiale, peine autant à retrouver régulièrement le chemin des théâtres depuis un demi-siècle. Un livret habile, une musique toute de fraîcheur et d’émotion : il n’en faut pas plus pour passer une formidable soirée. À la condition, bien sûr, de disposer de l’interprète adéquat pour le personnage central de Georges Brown… Car, comme l’a écrit un jour notre précieux collaborateur et ami Gérard Condé, jouant sur les paroles de l’air le plus célèbre de la partition, n’est-ce pas plutôt « Viens, gentil ténor, je t’attends, je t’attends ! » qu’il faudrait chanter avant toute représentation de La Dame blanche ? Salle Favart, en tout cas, on attend beaucoup de l’excellent Philippe Talbot.

« Quel charme ! Quel esprit ! Personne n’a rien écrit de tel depuis Figaro. Demandez le texte à Schlesinger, traduisez-le immédiatement, et que M. Marschner le monte aussitôt. C’est une trouvaille pour notre répertoire ! » De quel opéra parle-t-on ? De La Dame blanche de François-Adrien Boieldieu (1775-1834). Et qui est l’auteur de ces lignes ? Un certain Carl Maria von Weber… De passage à Paris, en février 1826 (1), il vient d’assister à une représentation à l’Opéra-Comique (alors installé Salle Feydeau), où l’ouvrage remporte un triomphe public depuis sa création, le 10 décembre 1825.

Triomphe est bien le mot qui convient : « On se querelle, on se bat pour louer des loges à la Dame blanche, et n’en a pas qui le désire, il faut s’y prendre trois jours à l’avance » (Courrier des Théâtres, 17 décembre 1825). Et pas seulement à l’Opéra-Comique, où La Dame blanche atteindra sa 1000e représentation, le 16 décembre 1862, puis la 1500e, le 2 janvier 1886. Dès les semaines suivant la première, l’opéra part à la conquête du reste de la France, à commencer par Rouen, la ville natale de Boieldieu, où il a fait ses débuts dans l’opéra (La Fille coupable, 1793). Pour l’occasion, le compositeur prend lui-même la baguette, ses concitoyens lui offrant une tabatière en or, puis une médaille à son effigie. À l’étranger, c’est la même traînée de poudre : Londres, La Haye, Berlin (à l’invitation de Spontini, qui y voit un « charmant ouvrage »), Liège, Bruxelles, Vienne, Copenhague, New York…

Comme beaucoup d’« opéras-comiques » des XVIIIe et XIXe siècles, La Dame blanche voit son étoile ternir après la Première Guerre mondiale. L’Opéra-Comique la représente encore en 1925-1926, dans une nouvelle production marquant le centenaire de la création, mais ce retour est sans lendemain, puisqu’il faudra attendre 1997 (!) pour la retrouver Salle Favart. Ce sont d’autres scènes qui entretiendront le flambeau, francophones et germanophones surtout, évitant que l’ouvrage ne bascule dans l’oubli complet.

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 158

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