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Heinrich Marschner. © DR
Après le Komische Oper de Berlin, en mars dernier, le Grand Théâtre de Genève affiche, à partir du 19 novembre, la nouvelle production de Der Vampyr d’Heinrich Marschner, dans une adaptation d’Antu Romero Nunes. L’occasion de mieux connaître ce fleuron de l’opéra romantique allemand, créé en 1828, que la France a découvert seulement en 2008, à l’Opéra de Rennes.

À quelques variantes près, le jugement reste le même. Dans tous les ouvrages consacrés à la musique -allemande du XIXe siècle, Heinrich Marschner est présenté non point comme une personnalité de premier plan mais comme un « trait d’union », en particulier entre Weber et Wagner, qu’il a bien connus l’un et l’autre et qui, à des titres divers, ont un moment soutenu son travail. Cette situation d’entre-deux peut expliquer l’oubli qui a vite frappé la plupart de ses opéras et de ses lieder, si prisés pourtant à l’époque et estimés aussi bien par Mendelssohn que par Schumann. Retrouver aujourd’hui ce compositeur impose donc de laisser de côté le domaine des génies, afin de voir plutôt en lui le témoin d’une période illustrant, par le choix de ses sujets comme par sa manière de les traiter, un certain goût « moyen ».

Depuis toujours, la scène lyrique offre de semblables exemples qui, avec un ou deux siècles de recul, nous en apprennent plus sur l’air du temps que sur les tempêtes à venir. Tel est le cas de Der Vampyr, « grand opéra romantique » en deux actes, créé le 29 mars 1828, à Leipzig, repris ensuite avec succès dans plusieurs théâtres germaniques et représenté à Londres dès 1829. Si son sujet n’est pas tout à fait nouveau, il est incontestablement à la mode. Quant à sa musique, elle repose sur un mélange d’influences ouvertement assumées et de timides innovations personnelles. N’est-ce pas, d’ailleurs, sous ce double aspect qu’il faut apprécier la carrière musicale de Marschner, né à Zittau, le 16 août 1795 et décédé à Hanovre, le 14 décembre 1861 ?

Après des études de droit, le jeune Heinrich s’oriente définitivement vers la musique. En tant que chef d’orchestre et compositeur, il occupe plusieurs postes importants dans de grands théâtres germaniques, à un moment où la commande d’œuvres nouvelles ne dépend plus exclusivement du mécénat princier. Sa rencontre avec Beethoven, à Vienne, semble avoir été déterminante. Grâce au soutien de Weber, il connaît son premier succès professionnel, en 1820, avec son « grand opéra » en trois actes, Heinrich IV und D’Aubigné. Mais quand, en 1826, l’auteur de Der Freischütz disparaît, Marschner ne réussit pas à prendre sa succession à Dresde. L’année suivante, il s’installe à Leipzig, en tant que Kapellmeister. Plus tard, on le retrouve, au gré de ses engagements, à Berlin (où est créé, en 1833, Hans Heiling, son opéra le plus connu), à Dresde (où son Kaiser Adolph von Nassau est dirigé par Wagner) et enfin à Hanovre, où il finit ses jours.

À côté de plusieurs centaines de lieder et de compositions chorales, son œuvre lyrique se partage entre « Singspiele » et « grands opéras romantiques ». Parmi ces derniers, en plus des titres déjà cités, on peut retenir Der Templer und die Jüdin, créé à Leipzig, le 22 décembre 1829, sur un livret de Wilhelm August Wohlbrück inspiré d’Ivanhoe, le roman de Walter Scott, paru en 1820.

Wohlbrück est également le librettiste de Der Vampyr, adapté lui aussi d’un roman anglais, The Vampyre, publié à Londres, en 1817, et attribué, lors de sa première édition, à Byron. Son auteur était en réalité John Polidori (1795-1821), un proche du sulfureux lord, dont il avait été un moment le médecin et le secrétaire. On sait parfaitement aujourd’hui dans quel cadre et dans quelles conditions ce bref ouvrage, aux dimensions d’une nouvelle, a été écrit, le roman d’Emmanuel Carrère, Bravoure (P.O.L, 1984), ainsi que le film de Ken Russell, Gothic (1986), étant revenus sur cet épisode marquant de l’histoire littéraire.

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 122

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