© ALAN HUMEROSE

Pour les fêtes, le directeur de l’Opéra de Lausanne avait choisi un bijou de l’opérette allemande : Im weissen Rössl de Ralph Benatzky, dans sa célèbre adaptation française de 1932, L’Auberge du Cheval-Blanc. Un mois après l’interview, les représentations ont malheureusement été annulées.

Il est difficile aujourd’hui, quand on s’entretient avec le directeur d’un Opéra, de ne pas évoquer d’abord les conséquences de l’épidémie de coronavirus sur la vie du théâtre…

Nous n’avons subi à Lausanne, au printemps dernier, qu’un semi-confinement, qui nous a obligés cependant à supprimer trois spectacles (Candide, L’elisir d’amore et Davel), ainsi que la nouvelle production d’Eugène Onéguine qui aurait dû ouvrir la saison 2020-2021. Nous allons les reprogrammer, bien sûr, au cours des deux années à venir, ce qui nous a contraints à un subtil travail d’ajustement ! Pour l’instant, nous jouons avec une jauge limitée à 750 spectateurs, tous masqués, répartis par blocs de 72 places. Les instrumentistes à cordes sont, eux aussi, masqués. Au moment où je vous parle, le canton de Vaud n’est pas en zone écarlate ; nous avons donné un spectacle du Béjart Ballet Lausanne et deux concerts, et nous préparons nos prochaines productions : Le Petit Chaperon rouge (1) et, pour la fin de l’année, L’Auberge du Cheval-Blanc.

Ne souffrez-vous pas de la désaffection du public étranger ?

Assez peu. Notre public appartient surtout à l’arc lémanique, de Genève à Fribourg, avec environ 10 % de spectateurs qui viennent d’Évian ou de Thonon. Il faut cependant tirer une leçon positive de la situation que nous vivons : on parle enfin de l’économie du spectacle, et certains directeurs de théâtre commencent à réfléchir à cette folie consistant à faire venir des artistes de très loin, ce qui, mécaniquement, pousse à la hausse perpétuelle des cachets ! À Lausanne, depuis quinze ans que je dirige l’Opéra, j’engage volontiers de jeunes chanteurs issus de notre Haute École de Musique (HEMU) que j’estime prometteurs : Benjamin Bernheim, Marina Viotti et Eve-Maud Hubeaux, pour ne donner que trois exemples, sont passés par cette école.

Vous avez évoqué Eugène Onéguine, qui aurait dû inaugurer cette saison du 150e anniversaire de la maison, alors que, le 10 mai 1871, l’Opéra de Lausanne avait ouvert ses portes avec Il barbiere di Siviglia

En effet. Mais notre dernière production en date d’Il barbiere di Siviglia a déjà été reprise deux fois ici ; elle a également été présentée aux Chorégies d’Orange, en 2018, alors qu’Eugène Onéguine n’a été donné qu’une fois dans le canton de Vaud, au Théâtre du Jorat, à Mézières. Et puis, environ 15 000 Russes habitent à Lausanne, dont beaucoup sont de nos fidèles ; c’était aussi l’occasion de s’adresser à eux. Les 150 ans de l’Opéra seront dignement fêtés, les 26 et 28 mars 2021, par un concert de gala. J’ajoute que nous accueillons cette année, pour raison de travaux, des spectacles du Théâtre Vidy-Lausanne.

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 167

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