À partir du 17 mai, l’Opéra de Dijon redonne sa chance au plus célèbre opéra de Luigi Cherubini, en français comme à sa création, en 1797, et avec l’alternance de morceaux chantés et de passages parlés. Il s’agira de la septième mise en scène lyrique de Jean-Yves Ruf.

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© BENJAMIN CHELY

Pour un homme de théâtre, se confronter à un mythe tel que celui de Médée doit être une tentation à laquelle il est difficile de résister !

C’est un projet très exaltant mais qui peut aussi mettre la pression sur un metteur en scène, car ce mythe a été visité à de nombreuses reprises, que ce soit par Euripide, Sophocle, Corneille, Christa Wolf… Je connaissais mal l’opéra de Cherubini, d’autant plus qu’il n’est que rarement joué dans sa version française ; la Médée littéraire m’était plus familière. Quant à l’image de Maria Callas, qui a marqué définitivement le rôle, elle m’était très lointaine, et me venait du film de Pier Paolo Pasolini. La musique de Cherubini est magnifique ; plus je l’écoute, plus elle me séduit ! Mais elle contient de nombreuses répétitions, comme si c’était un moyen pour les personnages d’exprimer leurs obsessions ; à nous de trouver comment leur donner un sens.

L’intérêt de ce mythe vient-il de ce qu’on peut l’appréhender grâce à plusieurs portes d’entrée ?

Effectivement. De nombreux motifs s’y entrecroisent. L’histoire familiale est évidente, même si les situations qu’elle développe ne se retrouvent que rarement dans la vie quotidienne ; c’est toutefois une ligne très concrète et inévitable, mais je me méfie d’une lecture trop horizontale et proche du fait divers. Médée, qu’on considère d’abord comme la meurtrière des enfants qu’elle a eus avec Jason, peut être vue de manière plus complexe, faire figure d’étrangère, être un bouc émissaire… C’est ainsi que la perçoit Christa Wolf, davantage comme une victime. En même temps, c’est le fait qu’elle les tue qui rend le mythe mystérieux. Quand elle arrive, elle demande justice. Plus le temps passe, plus elle se sent incomprise, trahie, et elle en appelle à des dieux très obscurs comme les Euménides. J’essaierai de montrer le combat intérieur qu’elle va vivre. À la fin, c’est comme la lutte de deux haines ; elle aura rendu Jason aussi haineux qu’elle-même peut l’être, mais en un sens, ils reformeront un couple. Le piège, ce serait de faire une Médée hystérique et un Jason pleutre.

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 117

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